Mots-clés : les autres et nous
Visio-Conférence FlahMeeting
Visions de l’autre
20 novembre 2008
Participants : Anabelle et Pierre (Ile Maurice), Koffi (Ouagadougou, Burkina Faso), Bettina (Madrid, Espagne), Denis (depuis Bruxelles, Belgique), Axelle, Mathieu, Arnaud et Jean-Michel (France).
Nous avons démarré la discussion par un rapide « tour de table » pour nous présenter puis avons embrayé sur le thème de la vision de l’autre et des voyages sur base de la synthèse effectuée par Bettina.
Pierre nous dit qu’il prépare un « BarCamp » sur le thème du développement durable (Île Maurice durable). Une réunion Flash Meeting aura lieu ce samedi 22 novembre à 10h (heure française) sur le lien http://fm.ea-tel.eu/fm/3656ed-15219.
Il nous conseille de visiter le site http://www.planete-urgence.org/
Annabelle, l’épouse de Pierre est Mauricienne et vit avec son mari à l’Île Maurice. Elle n’a jamais été en Europe et part le mois prochain en France pour un mois. Nous lui demandons quelle est sa vision de l’Europe ?
L’Europe est pour la plupart des Mauricien un Eldorado. De nouveaux paysages, de nouveaux personnages, nouvelle culture. Tout y est cher mais la vie y est facile. Cependant elle ne souhaiterait pas y vivre car chez elle, il y a son environnement, sa famille, ses amis. Elle compare l’Île Maurice avec Madagascar où elle se rend régulièrement. Là existe une véritable pauvreté. Des gens qui dorment dans la rue, qui ne se nourrissent qu’avec un peu de riz salé. Rien de tout cela sur l’Île Maurice. Tout le monde a un toit et peu se nourrir à sa faim. Elle se dit plus à l’aise avec « les pauvres » venant elle-même d’une famille modeste.
Comment voit-elle les Français en général ?
90% des touristes de l’île sont français (ou du moins francophones), c’est donc à partir de cette expérience qu’elle nous répond. Amical, aimable, facile de lier amitié avec eux (car ils partagent la même langue).
Etonnement de la part des animateurs présents car nous avions l’impression d’une image plus négative du Français à l’étranger !
Koffi, nous dit qu’au Burkina Faso, la vision est différente car le Français est d’abord un ancien colon et que dans son pays il ressent plutôt une dictature de la France et du français. Au Burkina Faso, le Français est perçu comme quelqu’un qui parle beaucoup, qui joue au patron avec son beau costume et sa belle cravate, qui (contrairement à l’Allemand) n’est pas capable d’aller sur le terrain « les deux pieds dans la boue », qui sait juste donner des ordres mais est incapable d’écouter !
Il semble y avoir un certain amalgame entre l’individu français et l’Etat français !
Un regret commun est que le continent Africain soit en général, vu du Nord, perçu comme un continent pauvre et en guerres incessantes.
Est alors intervenu le sujet des Africains qui décident de s’expatrier pour rejoindre ce qu’ils croient être « l’Eldorado » dans les pays considérés comme « riches » ! En arrivant sur notre continent, ils vivent souvent la galère, voire l’enfer. Mal payés, mal logés, mal nourris. Subissent de la discrimination due à la couleur de leur peau. Economisant malgré tout, ils arrivent à grandes peines, à envoyer de l’argent « au pays » pour faire vivre une partie de la famille. Ce qui peut créer dans le pays d’origine une sensation de bien-être et de richesse. Quand ils rentrent au pays, avec leurs économies, ils sont considérés comme des rois, s’achètent une maison et vivent plus aisément. Peu d’entre eux disent la vérité sur les conditions, souvent misérables, dans lesquelles ils ont vécu. Cela dit, plus il y aura de pauvreté dans le Sud, plus les gens auront tendance à s’expatrier.
Nous parlons de la discrimination raciale. Koffi nous raconte l’anecdote suivante :
Lorsqu’il vient en France en provenance de son pays, il est particulièrement contrôlé et regardé suspicieusement par les douaniers. Par contre, quand il arrive en France en provenance des USA, il n’y a aucun problème et passe la douane « normalement » !
La langue française
Pour Annabelle, le français c’est une voie d’accès à l’autre, permet de se rapprocher de l’autre. Si nous parlons la même langue, nous sommes frères !
Pour Koffi, c’est aussi la langue de l’administration, la langue du blanc, celle du pouvoir. Lorsque l’on a besoin d’un document sur place, c’est tout de même la langue locale qui est utilisée car on se fait mieux comprendre.
On utilise la langue locale ou le français selon le cas. En Famille ou chez les amis c’est souvent la langue locale, pour le travail c’est souvent le français ou l’anglais. Il est remarquable que l’Africain soit en général polyglotte. Koffi nous dit pratiquer sept langues mais que comme il ne maîtrise pas parfaitement l’anglais, il se sent parfois considéré comme un analphabète !
Annabelle nous dit pratiquer couramment le Créole, le Français et l’Anglais ce qui nous fait rêver en Europe car souvent nous sommes très fier de parler notre langue et une autre langue (souvent l’Anglais) ! Pour Anabelle, c'est plus facile pour elle de parler le français qu'un indou par exemple. Mais elle parle le créole à la maison.
On peut voir un parallèle avec les langues régionales en France qui disparaissent (ce que Koffi ne souhaite surtout pas pour les langues africaines) mais qui sont parfois utilisés comme mode de reconnaissance en glissant quelques mots (c'est le cas pour moi en morvandiaux mais Koffi cite aussi cet exemple dans les rapports avec l'administration burkinabé : en glissant quelques mots d'une langue commune on se reconnait et l'autre devient "mon frère".
La langue c’est notre identité.
Koffi nous dit qu’il a été prouvé qu’un enfant acquérait autant de capacités d’apprentissage en 5 années d’enseignement dans la langue locale qu’en 6 ans en langue française !
Les Médias
Bettina cite le commentaire de Gratien sur la liste "C'est donc à nous les Africains de nous battre pour offrir aux autres d'autres angles de perception de notre continent" et Koffi parle de Metropolis TV, une WebTV mondiale à laquelle il collabore http://www.metropolistv.nl.
Chaque fois que l’on parle ou écrit sur l’Afrique dans les journaux occidentaux c’est pour parler de la pauvreté et des guerres incessantes. Rarement pour souligner une avancée en matière de démocratie ou de développement positif ! Il est exact, que souvent les journalistes occidentaux ne sont envoyés en mission en terre d’Afrique que pour couvrir ce genre de triste événement. Les journaux et journalistes locaux n’ont pas les mêmes moyens financiers et techniques que ceux en Occident. Raisons pour lesquelles, ils ont du mal à nous faire parvenir des reportages et/ou articles vantant la beauté et les bienfaits du continent Africain !
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