C’est une chose que nous avons pu constater plusieurs fois : même le rédacteur d’un texte n’en comprend pas tous les éléments ! Lors de l’écriture d’un livre par exemple, l’un d’entre nous se vit dire par un de ses lecteurs « j’ai mis en place tel aspect qui m’a énormément servi ». Pourtant, l’aspect en question n’avait pas été vu par l’auteur lui-même dans son propre livre ! Dans un groupe de travail sur l’intelligence collective, le rédacteur des synthèses autour des échanges collectifs, décida après avoir obtenu un texte qui convenait à tous, de modifier quelques termes par des synonymes pour éviter les répétitions. Il s’attira les remarques de certains participants qui faisaient une distinction importante entre les deux termes. Comme, lors de la première synthèse, il avait choisi, par hasard, le bon terme, il n’y avait pas eu de débat sur cette distinction qu’il ne connaissait pas encore. « Quand vous faites un livre, il y a autant d'interprétations du livre que vous pouvez avoir de lecteurs. » (Jean-Paul Dubois).
Pourtant ce n’est pas faute d’essayer. Comme le dit Morgan Sportès « Tout écrivain, symboliquement, extermine son lecteur, afin de mieux lui offrir son œuvre achevée ». Ainsi, dans la société occidentale, la langue, et encore plus la langue écrite, sont perçues comme devant être le moins ambiguës possible, ce qui est un leurre. Le chinois, au contraire, assume l’ambiguïté de la langue. Mieux encore, dans la langue orale, beaucoup de mots se prononcent de la même façon (un mot est en général un phonème, et même si le nombre de phonèmes est plus important que dans les langues occidentales, grâce notamment à l’accentuation, beaucoup de mots se prononcent de la même façon). Ainsi, un des objectifs de la langue chinoise est avant même de vouloir communiquer sa propre pensée, de pouvoir montrer à l’autre que ce qu’il vient de dire peut être compris autrement. Le chinois est plus encore une langue à penser qu’une langue pour communiquer[1].
Armé de ce texte commun qui a permis de « resynchroniser » le groupe grâce aux échanges, sans toute fois lever l’ambiguïté, le groupe de pilotage décide de lancer un premier thème. La musique est choisie car c’est le thème de prédilection d’un des membres du groupe qui a rejoint peu avant l’équipe de pilotage grâce à l’institut. C’est également un terme transversal qui permet d’aborder de nombreuses facettes de l’interculturalité.